La saga Renault 5 : de l’icône populaire à la renaissance électrique

Une révolution nommée R5

Lorsqu’elle fait son apparition sur les routes françaises en janvier 1972, la Renault 5 bouleverse les codes de l’automobile populaire. Conçue par Michel Boué, cette citadine compacte aux lignes rondes et aux pare-chocs en plastique intégrés représente une véritable innovation dans le paysage automobile. Surnommée affectueusement « la petite bombe » par ses admirateurs, elle incarne l’esprit des années 1970 : pratique, économique et dotée d’une personnalité unique.

« La Renault 5 a été pensée comme un vêtement que l’on enfile, pas comme une machine que l’on conduit », confiera plus tard Bernard Hanon, alors directeur du produit chez Renault. Cette philosophie se traduit par une voiture facile à vivre qui séduit immédiatement un large public, des jeunes urbains aux familles.

L’ère des succès commerciaux

Commercialisée d’abord avec des moteurs de 782 cm³ et 956 cm³, la R5 connaît rapidement un succès considérable. Sa polyvalence et son prix abordable en font la coqueluche du marché français, avant de conquérir l’Europe. En 1976, l’arrivée de la sportive R5 Alpine (devenue Alpine Turbo en 1982) propulse la petite citadine dans une autre dimension, celle des « GTI » avant l’heure.

L’apogée de cette première génération arrive sans conteste avec la légendaire R5 Turbo, véritable bête de course à moteur central arrière, développée pour les épreuves de rallye. Avec ses ailes élargies et ses 160 ch (qui monteront jusqu’à 185 ch pour la Turbo 2), elle s’impose comme l’une des voitures les plus spectaculaires de son époque.

Entre 1972 et 1984, plus de 5,5 millions d’exemplaires de cette première génération seront produits, faisant de la R5 l’un des plus grands succès commerciaux de l’histoire de Renault.

La Supercinq : l’évolution dans la continuité

Face à une concurrence de plus en plus féroce, Renault présente en 1984 la « Supercinq ». Confiée au designer italien Marcello Gandini, cette nouvelle génération conserve l’ADN de sa devancière tout en adoptant une silhouette plus contemporaine et anguleuse, caractéristique des années 1980.

Si l’esprit reste le même, la technique évolue considérablement : la Supercinq adopte une architecture moderne à traction avant avec moteur transversal, abandonnant la conception dérivée de la Renault 4 de la première génération.

« Nous avons voulu préserver l’âme de la R5 tout en l’inscrivant dans son époque », expliquait alors Georges Douin, directeur du développement chez Renault. Une mission réussie puisque la Supercinq s’impose à nouveau comme un succès commercial majeur avec plus de 3,4 millions d’unités produites jusqu’en 1996.

La version sportive GT Turbo devient rapidement iconique avec son moteur 1,4 litre turbocompressé développant 115 ch. Elle s’illustre particulièrement en compétition et reste aujourd’hui très recherchée par les collectionneurs.

La transition et l’héritage

À la fin des années 1990, la lignée directe de la R5 s’éteint pour laisser place à la Twingo puis à la Clio, qui devient le nouveau fer de lance de Renault dans le segment des citadines. La R5 entre alors dans la légende automobile, symbole d’une époque où les voitures avaient encore une forte personnalité.

Durant plus de deux décennies, le nom « R5 » disparaît du catalogue Renault, mais son souvenir reste vivace. Des générations entières de conducteurs conservent un attachement particulier pour ce modèle qui a contribué à démocratiser l’automobile en France.

La renaissance électrique

C’est en janvier 2021 que Renault crée la surprise en dévoilant la « 5 Prototype », une réinterprétation électrique de l’iconique citadine. Luca de Meo, directeur général du groupe Renault, parle alors d’un « projet qui puise dans l’ADN de la marque pour réinventer son futur ».

Quatre ans plus tard, en 2024, la nouvelle R5 électrique fait ses débuts officiels. Fidèle aux lignes caractéristiques de l’originale, mais résolument tournée vers l’avenir, elle incarne la « Renaulution » voulue par de Meo. Avec une autonomie pouvant atteindre 400 kilomètres (norme WLTP) et des technologies connectées de dernière génération, la R5 E-Tech Electric (son nom officiel) s’impose comme l’un des modèles électriques les plus attendus de ces dernières années.

« Nous n’avons pas voulu créer une simple réplique nostalgique, mais plutôt réinterpréter l’esprit de la R5 pour le XXIe siècle », précise Gilles Vidal, directeur du design de Renault. Les clins d’œil au modèle original sont nombreux : feux avant et arrière distinctifs, capot incliné, silhouette trapue… mais le tout est sublimé par des touches futuristes comme les indicateurs de charge LED intégrés à l’avant du véhicule.

Un symbole de la transition énergétique française

Produite en France, dans l’usine « ElectriCity » du Nord, la nouvelle R5 électrique symbolise également la volonté de Renault de maintenir son savoir-faire industriel sur le territoire national. Un choix stratégique qui s’inscrit dans le cadre plus large de la transition énergétique européenne.

Proposée à un tarif voulu accessible pour une voiture électrique (à partir de 33 490 €), la R5 électrique ambitionne de démocratiser la mobilité zéro émission, comme sa devancière avait démocratisé l’automobile dans les années 1970. Un pari audacieux à l’heure où le marché automobile traverse une profonde mutation.

L’âme d’un mythe, l’esprit du temps

Cinquante-trois ans après la présentation de la première R5, cette renaissance électrique démontre la force des icônes automobiles capables de traverser les époques. De la citadine populaire des années 1970 à la voiture électrique connectée d’aujourd’hui, la Renault 5 a su conserver son statut particulier dans le cœur des Français.

« La R5, c’est plus qu’une voiture, c’est un véritable objet culturel qui a marqué plusieurs générations », analyse Jean-Pierre Ploué, directeur du design pour le groupe Renault. « Sa renaissance sous forme électrique n’est pas un simple exercice de style nostalgique, mais bien l’affirmation d’une continuité dans l’histoire de Renault et de l’automobile française. »

Alors que les premiers exemplaires commencent à sillonner nos routes, une chose est sûre : avec sa silhouette reconnaissable entre mille et son nouveau cœur électrique, la R5 version 2025 perpétue l’esprit d’audace et d’innovation qui a toujours caractérisé ce modèle emblématique du patrimoine automobile français.